Décharge de rappels de droits de taxe sur la valeur ajouté pour une association

Décision de justice
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TRIBUNAL ADMINISTRATIF

DE GRENOBLE

N°1003679

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ASSOCIATION DES COMMERCANT DE GRAND PLACE

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M. Villard

Rapporteur

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Mme Holzem

Rapporteur public

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Audience du 7 novembre 2013

Lecture du 19 décembre 2013

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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Tribunal administratif de Grenoble

(4ème Chambre)

19-06-02-08-03-02

C+

Vu la requête, enregistrée le 17 août 2010, présentée pour l'association des commerçants de Grand-Place, dont le siège est Grand Place, à Grenoble (38380), par Me Duraffourd ; l'association des commerçants de Grand Place demande au tribunal ;

1°) de lui accorder la décharge des rappels de droits de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre des années 2006 et 2007 ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

..........................................................................................................

Vu la décision par laquelle le directeur des services fiscaux de l'Isère a statué sur la réclamation ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 7 mars 2011, présenté par le directeur des services fiscaux de l'Isère, qui conclut au rejet de la requête ;

..........................................................................................................

Vu le mémoire, enregistré le 11 octobre 2013, présenté pour l'association des commerçants de Grand-Place, qui maintient ses conclusions et porte à 5 000 euros la somme demandée au titre de l'application de l'article L 761-1 du code de justice administrative ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la décision du Conseil constitutionnel n°91-298 DC en date du 24 juillet 1991;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 novembre 2013 :

- le rapport de M. Villard, rapporteur ;

- les conclusions de Mme Holzem, rapporteur public ;

- et les observations de Me Duraffourd, représentant l'association requérante ;

1. Considérant que l'association des commerçants de Grand Place, qui pour activité l'animation et la promotion du centre commercial éponyme, notamment par l'émission et la mise en circulation de titres cadeaux, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle l'administration l'a assujettie à des rappels de droits de taxe sur la valeur ajoutée au titre des années 2006 et 2007 dont elle demande la décharge ;

Sur le bien-fondé des impositions :

2. Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'activité de l'association requérante consiste notamment à assurer l'émission et la vente de « chèques cadeaux » auprès de particuliers, valables uniquement auprès de ses adhérents commerçants ; qu'en échange de la remise d'une somme d'un montant déterminée, l'association émet un « chèque cadeaux » représentant cette somme, qui pourra être présenté auprès d'un de ses membres en tant que moyen de paiement afin d'acquérir un bien ou une prestation de service, ce dernier se voyant ensuite reverser par l'association, sur présentation du « chèque cadeau », une somme correspondant à la valeur faciale de celui-ci ; que la déduction d'une partie de la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé les biens et service utilisés par l'association requérante dans le cadre de l'activité décrite ci-dessus a été remise en cause par l'administration au motif que les charges en cause étaient utilisées concurremment pour la réalisation d'opérations imposables et pour la réalisation d'opérations situées hors du champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée ; que s'agissant de ces dernières opérations, l'administration a considéré qu'elles consistaient en l'émission de ces « chèques cadeaux », et que le montant du chiffre d'affaires réalisé correspondait à leur valeur faciale cumulée ;

3. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 256 du code général des impôts : « I. Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de service effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel (...) IV [...] 2° Sont également considérées comme des prestations de services : [...] b) Les opérations portant sur les actions, les parts de sociétés ou d'associations, les obligations et les autres titres, à l'exclusion des titres représentatifs de marchandises et des parts d'intérêt dont la possession assure en droit ou en fait l'attribution en propriété ou en jouissance d'un bien immeuble ou d'une fraction d'un bien immeuble. / Le chiffre d'affaires afférent aux opérations, autres que celles de garde et de gestion, mentionnées ci-dessus est constitué par le montant des profits et autres rémunérations. [...] » ;

4. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 271 du même code : « I. 1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération (...) » ; qu'aux termes de l'article 207 bis de l'annexe II audit code : « 1. a) Un redevable qui réalise des opérations situées hors du champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée et des opérations imposables à la taxe sur la valeur ajoutée doit, pour opérer la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée afférente à ces dépenses, procéder préalablement à l'affectation de ces dépenses en fonction de leur utilisation, totale ou partielle, pour la réalisation de chacune de ces deux catégories d'opérations [...] d) La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les biens ou les services utilisés concurremment pour la réalisation d'opérations imposables en vertu des articles 256 et suivants du code général des impôts et pour la réalisation d'opérations situées hors du champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée, n'est déductible dans les conditions prévues aux articles 205 à 242 B, qu'en proportion de l'utilisation de ces biens et services pour la réalisation d'opérations imposables. Pour le calcul de cette proportion, les redevables peuvent appliquer une clef de répartition commune à l'ensemble des dépenses concernées, à condition de pouvoir la justifier (...) » ;

5. Considérant que les titres cadeaux en cause permettent à leur porteur d'acheter un produit ou un service auprès d'un vendeur ou d'un prestataire qui l'accepte comme moyen de paiement, ce dernier détenant alors à l'encontre de l'association requérante une créance dont le montant correspond à la valeur faciale de ce dernier ; qu'ainsi, les opérations effectuées par l'association requérante, telles que décrites au point 2, doivent être regardées comme portant sur des « titres » au sens des dispositions du b) du 2° du IV de l'article 256 précité ; qu'en application de ces dispositions, le chiffre d'affaires afférent à de telles opérations est constitué par le seul montant des profits et autres rémunérations qui ont, en l'espèce, consisté, jusqu'au 1er avril 2007, en la perception de cotisations annuelles auprès de ses adhérents, et à compter de cette date, à une retenue de 3% sur les montants qu'elle leur reversait ; qu'au demeurant, les sommes versées par les particuliers en échange de la remise de ces titres ne représentent pas la contrepartie du service qui leur est rendu par l'association, qui doit être regardé comme effectué à titre gratuit à leur égard, et ne sauraient par conséquent être qualifiées de recettes constitutives de chiffre d'affaires ; qu'elles ne peuvent, par conséquent, figurer ni au numérateur ni au dénominateur du prorata de déduction mentionné à l'article 207 bis de l'annexe II au code général des impôts ; que dès lors, l'association des commerçants de Grand Place est fondée à soutenir que c'est à tort que l'administration a considéré que les sommes correspondant à la valeur faciale des titres cadeaux devaient être regardées comme constitutive d'un chiffre d'affaires non imposable devant figurer au dénominateur dudit prorata ;

6. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que l'association des commerçants de Grand Place est fondée à demander la décharge des rappels de droits de taxe sur la valeur ajoutée susvisés qui lui ont été réclamés ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés en cours d'instance et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : L'association des commerçants de Grand Place est déchargée des rappels de droits de taxe sur la valeur ajoutée susvisés qui lui ont été réclamés.

Article 2 : L'Etat versera à l'association des commerçants de Grand Place la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent jugement sera notifié à l'association des commerçants de Grand Place et au directeur départemental des finances publiques de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 7 novembre 2013, à laquelle siégeaient :

M. Harang, président,

M. Moya, conseiller

M. Villard, conseiller,

Lu en audience publique le 19 décembre 2013.

Le rapporteur,

N. VILLARD

Le président

P. HARANG

Le greffier,

C. BILLON

La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.