Demande de condamnation du centre hospitalier d'Annecy Genevois par la C.P.A.M. de la Haute-Savoie

Décision de justice
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Vu la requête, enregistrée le 18 juillet 2012, présentée pour la Caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Savoie, dont le siège est 2, rue Robert Schuman à Annecy cedex 9 (74984), par la SCP Fessler-Jorquera-Cavailles ;

 

La Caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Savoie demande au tribunal :

 

1°) de condamner le centre hospitalier régional d’Annecy à lui verser au titre de son recours subrogatoire la somme de 20 969,04  euros correspondant à 90 % des débours engagés dans la prise en charge de Mme Odile X ;

 

2°) de mettre à la charge du centre hospitalier régional d’Annecy une somme de 1 300 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les entiers dépens;

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Vu le mémoire en défense, enregistré le 5 mars 2013, présenté pour le centre hospitalier régional d’Annecy qui conclut à titre principal au rejet de la requête, à titre subsidiaire à la réduction du montant des débours qui ne pourra pas dépasser 90% du montant total ;

 

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Vu le mémoire, enregistré le 9 avril 2013, présenté pour la Caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Savoie qui confirme ses précédentes conclusions ;

 

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Vu les autres pièces du dossier ;

 

Vu le code de la santé publique ;

 

Vu le code de justice administrative ;

 

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 avril 2015 ;

 

- le rapport de Mme Bril,

- les conclusions de M. Lefebvre,

- les observations de Me Fessler pour la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Savoie et de Me Roche pour le centre hospitalier d’Annecy ;    

 

Vu la note en délibéré de la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Savoie enregistrée le 4 mai 2015 ;

 

1. Considérant que Mme X, accompagnatrice de montagne, a été vicitme d’un accident de montagne le 8 avril 2006 alors qu’elle accompagnait, dans le cadre de son activité professionnelle, un groupe de randonneurs ; qu’elle a été prise en charge par le centre hospitalier d'Annecy pour différentes fractures au niveau de la jambe droite et du genou gauche ; qu’elle a fait l’objet d’une nouvelle intervention par le centre hospitalier d'Annecy le 17 septembre 2007, d’une part pour l’ablation du matériel opératoire implanté lors de la prise en charge de l’accident du 8 avril 2006, d’autre part pour une hernie musculaire sur la jambe droite ; que des complications sont apparues dès le lendemain de cette seconde prise en charge par la manifestation syndrome des loges ; qu’il en est résulté une paralysie du nerf sciatique du pied droit ; que Mme X a saisi la commission régionale de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux laquelle, sur rapport d’expertise, a conclu à la responsabilité à hauteur de 90% du centre hospitalier d'Annecy ; que l’assureur du centre hospitalier d'Annecy a rejeté la demande de remboursement des débours présentés par la CPAM de Haute-Savoie au motif qu’aucune faute ne pouvait être reprochée au centre hospitalier d'Annecy ;

 

2. Considérant qu’aux termes du I de l’article L. 1142-1 du code de la santé publique : « Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute. » ;

 

Sur l’obligation d’information de la patiente :

 

  1. Considérant qu’aux termes de l’article L. 1111-2 du code de la santé publique, dans sa rédaction applicable à la date des faits : « Toute personne a le droit d'être informée sur son état de santé. Cette information porte sur les différentes investigations, traitements ou actions de prévention qui sont proposés, leur utilité, leur urgence éventuelle, leurs conséquences, les risques fréquents ou graves normalement prévisibles qu'ils comportent ainsi que sur les autres solutions possibles et sur les conséquences prévisibles en cas de refus (…) Des recommandations de bonnes pratiques sur la délivrance de l'information sont établies par la Haute Autorité de santé et homologuées par arrêté du ministre chargé de la santé. / En cas de litige, il appartient au professionnel ou à l'établissement de santé d'apporter la preuve que l'information a été délivrée à l'intéressé dans les conditions prévues au présent article. Cette preuve peut être apportée par tout moyen.» ; qu’un manquement des médecins à leur obligation d’information engage la responsabilité de l’hôpital dans la mesure où il a privé le patient d’une chance de se soustraire au risque lié à l’intervention en refusant qu’elle soit pratiquée ; que c’est seulement dans le cas où l’intervention était impérieusement requise, en sorte que le patient ne disposait d’aucune possibilité raisonnable de refus, que les juges du fond peuvent écarter l’existence d’une perte de chance ;

 

4. Considérant toutefois que la CPAM de Haute-Savoie ne saurait, s’agissant de règles relatives à l’administration de la preuve qui ne peuvent trouver à s’appliquer en l’absence de toute contestation, par le patient concerné, de la réalité de l’information fournie sur son état de santé, utilement invoquer le régime spécifique de preuve prévu par l’article L. 1111-2 du code de la santé publique cité ci-dessus, pour demander à être indemnisée des frais qu’elle a engagés ;

 

Sur le retard de prise en charge invoqué :

 

5. Considérant qu’il résulte de l’instruction que le chirurgien du centre hospitalier d'Annecy n’envisageait pas, à la date de la consultation du 17 septembre 2007, de recourir à une nouvelle intervention sur Mme X en l’absence de déficit sensitif constaté ; que si le syndrome des loges était pressenti au terme de l’intervention du 13 septembre 2007 et figurait comme tel dans le dossier médical de la patiente qui mentionne un suivi régulier jusqu’à la consultation du 17, aucune pièce du dossier ne permet de considérer ni que la surveillance de la patiente était insuffisante, ni que le médecin aurait procédé à une intervention s’il avait constaté le syndrome des loges entre le 14 et le 17 septembre, ni enfin, et surtout, qu’une intervention aurait été de nature à supprimer ou à limiter la paralysie du nerf sciatique du pied droit subi par Mme X ; qu’ainsi la faute invoquée n’est pas établie ;

 

  1. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Savoie n’est pas fondée à demander la condamnation du centre hospitalier Annecy ; que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;

 

 

 

D E C I D E  :

 

 

Article 1er : La requête de la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Savoie est rejetée.

 

Article 2 : Le présent jugement sera notifié à la Caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Savoie  et au Centre hospitalier d’Annecy Genevois.